Être migraineuse chronique au quotidien
29 mars 2022
Je me considère plutôt en bonne santé, mais j’ai une maladie qui a des conséquences sur ma qualité de vie : je suis migraineuse chronique. J’avais donc envie de vous raconter ce que ça me fait et ce que j’ai mis en place notamment dans un cadre professionnel pour que ça se passe au mieux.
Les migraines, qu’est-ce que ça me fait ?
Tout d’abord, tous les maux de tête ne sont pas des migraines et ces dernières peuvent avoir bien d’autres symptômes qu’un mal de tête. Je suis migraineuse depuis mon adolescence. Mais les crises sont devenues plus régulières et plus brutales ces dernières années. J’en ai de deux types différents. Voici à quoi elles ressemblent chez moi :
Les migraines avec aura commencent par des signes qui précèdent la douleur : un champ de vision qui rétrécit, des tâches de lumière scintillante, des fourmillements dans une moitié du corps, des difficultés d’élocution ou des problèmes de mémoire. Cela m’est arrivé d’être dans l’incapacité de composer un numéro de téléphone que je connais par coeur ou de faire une phrase simple. Ces signes sont très impressionnants, ils durent chez moi entre quelques minutes et une demi-heure. Puis, ils disparaissent et laissent place à la douleur migraineuse, qui se situe souvent du côté opposé aux fourmillements. Chez moi, la douleur est modérée, le paracétamol est efficace et la crise disparait pendant le sommeil nocturne qui suit.
Les migraines cataméniales sont liées au cycle hormonal et ont lieu peu avant les règles et parfois pendant les menstruations également. Elles n’ont pas de signes avant-coureur et commencent par une douleur en général autour de l’oeil. Ce sont des crises longues (jusqu’à 3 jours), très douloureuses qui s’accompagnent de douleurs dentaires, d’hypersensibilité à la lumière et de nausées et de vomissements (joie). Le paracétamol n’y fait rien. Heureusement, j’ai maintenant un traitement de crise efficace (ibuprofène associé au café et triptan si ça ne fonctionne pas), mais j’y reviendrai.
Concrètement actuellement, par mois, j’ai environ 6 jours de migraine cataméniale (en général une très grosse crise et deux petites plus courtes) et il m’arrive d’avoir encore quelques migraines avec aura par an (mais c’est easy comparé aux autres). Pendant plusieurs années, j’ai accepté ce fait, en me disant que c’était comme ça, c’est génétique, puisque ma mère et ma grand-mère sont migraineuses. Et puis, quand même, je me disais que ça devenait de plus en plus présent, alors j’ai décidé d’aller au-delà des ressentis et de tout noter. J’ai commencé à tenir un journal de migraine et à me rendre compte que j’étais au lit, dans le noir, à ne pouvoir rien faire et ne pas pouvoir m’alimenter plusieurs jours par mois. Et j’ai décidé d’aller voir ma médecin.
Ma prise en charge médicale
Comme le disent les médecins invitées dans cet épisode de La Méthode scientifique, la migraine “fait partie des cinq maladies les plus invalidantes en termes de pertes d’années de vie en bonne qualité” et elle est la maladie du cerveau réfractaire au changement. Je m’explique : les migraines cataméniales sont provoquées par des changements hormonaux, les migraines avec aura chez moi sont souvent liées à un changement (par exemple de rythme de sommeil).
Je suis donc allée voir ma médecin avec mon journal de migraine qui a permis de diagnostiquer les migraines cataméniales, puisque j’avais vraiment tout noté et le rapprochement avec le cycle hormonal était évident. Elle m’a tout de suite expliqué que les traitements avaient fortement progressé en la matière et m’a proposé de tester l’ibuprofène et un antimigraineux spécifique (les triptans) avec différents conseils : prendre le médicament en début de crise, ne pas reprendre de triptan s’il n’est pas efficace, etc.
J’ai donc testé ces médicaments qui ce sont avérés efficaces et adaptés. J’ai maintenant une procédure de gestion de crise migraineuse satisfaisante :
- Je continue de tout noter car, mon cycle étant très régulier je sais à peu près quand les crises vont avoir lieu
- Dès les premiers signes, je prends de l’ibuprofène. Attendre en disant que “ça va passer” installe la crise et la rend plus difficile à traiter.
- Si possible, je bois du café en même temps. Chez moi, ça marche très bien sur la migraine. Des fois, manger un truc sucré aide aussi.
- Si jamais ça ne marche pas, je prends un triptan qui casse complètement la crise migraineuse.
- Si je sens que ça va être une grosse crise (quand je commence à avoir des douleurs dentaires ou bien à avoir l’appétit coupé), je prends un triptan.
- Je sais que si je prends un triptan, ce dernier va avoir des effets secondaires : je me sens lente et fatiguée. Mais je n’ai plus mal.
Mon organisation au quotidien
Comme vous l’avez compris, la migraine est présente dans ma vie. Alors au quotidien, au-delà des médicaments, comment ça se passe, notamment professionnellement ?
Bon, forcément, j’ai toujours mes médicaments avec moi. Et quand je suis en déplacement, je fais attention aux sources de café et d’en-cas auxquels j’ai accès (en cas de doute, j’en emporte).
J’en parle, aussi. Il m’est déjà arrivé d’être en crise en animant des formations. Je préviens donc les personnes présentes et je leur précise les symptômes (notamment quand il y a des auras et que je ne peux plus former une phrase intelligible - ça évite qu’iels croient que je suis en train de faire un AVC). Et quand ça va mieux, je le leur dis aussi.
J’essaye de faire attention à mon hygiène de vie car la migraine n’aime pas l’irrégularité. J’essaye de dormir à heure fixe, de bien m’hydrater, de ne pas sauter ou décaler de repas car le moindre changement peut être facteur déclencheur.
L’avantage avec les migraines cataméniales, c’est que je sais à peu près à quelle période elles vont arriver. Donc je m’organise en conséquence : j’évite les programmes trop chargés (quand je peux) ou les longs trajets en voiture. Quand je suis en déplacement, j’essaye d’avoir un hébergement dans lequel je peux avoir un maximum de liberté pour pouvoir me mettre au calme ou manger ce dont j’ai besoin quand j’en ai besoin. De façon plus globale, je fais attention à avoir toujours un lieu où je peux m’isoler facilement (merci les festival qui prévoient des salles silencieuses où on peut se poser).
J’essaye aussi de ne pas trop culpabiliser de mon manque de productivité dans ces jours de crise : dit comme ça, ça paraît évident, mais ce n’est pas si facile à appliquer.