Au dernier épisode, je vous avais laissé sur le refus par la plateforme Mon Master de ma candidature en Master 1 de sociologie pour “défaut de motivation”. Pourtant, plusieurs mois après, je commençais les cours du même Master, mais en deuxième année. Ce billet de blog va vous raconter ce qui s’est passé entre ces deux événements.
Comment j’ai sauté une classe
Autant vous dire que quand j’ai découvert la réponse de Nantes Université, j’ai ressenti une très forte déception, mais surtout une vive incompréhension. Je savais que le refus était une option possible du processus de sélection, mais j’étais en désaccord profond avec la raison avancée. Je ne vois pas comment on peut répondre à une personne qui a un projet réfléchi de reprise d’études qu’elle manque de motivation (et le terme “défaut” m’a vraiment mise en colère). Je me suis dit qu’iels s’étaient trompé, mais après de nombreux F5 sur Mon Master, j’ai du me rendre à l’évidence : a priori, il n’y avait pas d’erreur.
J’ai décidé de demander des explications et envoyé un mail aux codirecteurices du Master.
Et puis, j’ai attendu.
J’ai réalisé que je n’avais plus de projet professionnel pour l’après-Etabli. L’incertitude m’a fait beaucoup de mal : j’ai complètement paniqué à l’idée de ne pas avoir d’activité professionnelle à la rentrée. J’ai décidé de relancer une activité indépendante en réactivant mon auto-entreprise, pour au moins pouvoir facturer des prestations à la rentrée et m’assurer une rentrée financière complémentaire à mes modestes allocations chômage. Comme je suis très efficace, j’ai réussi à retrouver des contrats avec l’UCO et commencé à répondre à des marchés ou accepter des interventions.
J’ai relancé l’Université qui ne m’avait pas répondu.
J’ai continué à relancer mon activité tout en étant dans un tunnel de missions pour l’Etabli numérique. C’est au milieu d’une de ces missions (l’organisation d’une résidence d’écriture pour le projet Des Livres en Communs avec Framasoft et Transiscope) que j’ai reçu le mail suivant de la part du codirecteur du Master :
Bonjour Julie Brillet, Votre dossier nous a intéressés, mais [la codirectrice du Master] et moi voulions vous proposer une admission en M2 directement plutôt qu’en M1. Seriez-vous intéressée?
J’ai quelques petits problèmes avec les changements de programme, autant vous dire que là, mon cerveau était en PLS :
Mais !?! C’est pas du tout ce qui était prévu !!! Ahhhh il faut trouver une alternance ! Et heu iels ont vu que je n’avais pas de diplôme de socio ??? Iels se sont trompé ! Et j’ai relancé mon activité, il va falloir que je dise à mes client·es qu’en fait je les plante ! Non, mais je vais dire non à l’Universités, c’est vraiment trop compliqué.
Passée cette première réaction, les personnes raisonnables (et amusées par ce rebondissement) autour de moi m’ont invitée à faire ce qu’il y avait à faire : dire oui. J’ai réussi à avoir le codirecteur du Master au téléphone, avoir quelques explications (j’aurais du être au courant avant, mais les universitaires débordé·es font ce qu’iels peuvent) et des éléments sur comment m’inscrire, les attendus de l’alternance et comment préparer au mieux l’entrée en Master 2.
L’inscription à l’Université
La personne qui s’occupe de la formation continue à l’UFR de sociologie de Nantes est très efficace : l’inscription n’a pas été compliquée. Comme je n’avais pas encore trouvé d’alternance, on a dans un premier temps engagé mon CPF. Il m’a juste fallu trouver un téléphone non-dégooglisé pour réussir à utiliser L’identité numérique qui ne fonctionne pas avec un téléphone sous Lineage OS.
Ma carte d’étudiante était prête fin juillet, avec le même numéro d’étudiante qu’il y a 25 ans !
La recherche d’alternance :
Le Master 2 se déroule donc en alternance, sur un rythme de deux semaines en cours suivies de deux semaines en entreprise. L’alternante doit à la fois poursuivre des missions relative à la santé et sécurité des travailleureuses pour l’entreprise et faire un mémoire de recherche à partir d’une problématique observée sur le lieu d’alternance. Quand j’ai reçu la réponse positive de l’Université, je n’avais pas cherché d’alternance, plutôt un stage puisque je pensais entrer en M1. Je me suis donc lancée à la recherche d’un contrat de professionnalisation, permettant de bénéficier du double statut d’étudiante et de salariée et, dans mon cas, d’être rémunérée à hauteur du SMIC.
Au départ, je voulais travailler dans le secteur associatif, pour observer ce que provoquait réellement les coupures budgétaires sur la santé des travailleureuses ou continuer à travailler sur les enjeux numériques. J’étais plus attirée par les structures de l’économie sociale et solidaire que l’industrie. J’ai donc commencé à en parler autour de moi, candidaté à diverses offres, mais on m’a renvoyé le manque de budget ou de besoin, j’ai donc élargi mes recherches.
J’ai pas mal douté de ma capacité à repasser un entretien d’embauche, me suis questionnée sur mon âge (ce podcast m’a bien fait flipper) et ma légitimité à être payée pour un travail dont j’allais acquérir les compétences au fil de l’année. Encore une fois, l’incertitude m’a mise en difficulté, alors que j’avais jusqu’à décembre pour commencer mon alternance. Je me suis mise à candidater partout y compris sur des trucs douteux. Je me suis abonnée à toutes les alertes possibles et inimaginables sur Indeed ou LinkedIn. J’ai pris conscience que ça devenait n’importe quoi quand j’ai hésité à envoyer mon CV dans une entreprise d’agroalimaentaire qui indiquait dans les critères de recrutement :
Comme nous, vous êtes amateurs de viande ?
Là, je me suis dit que ça allait trop loin.
Au final, j’ai eu une proposition d’entretien pour faire de l’analyse de données sur des tableurs, un refus très encourageant, quelques refus standardisés, mais surtout de très nombreuses absences de réponse.
Comment j’ai trouvé mon alternance
En parallèle, j’ai recontacté Codeureuses en Liberté, coopérative d’indépendant·es en informatique avec qui j’avais échangé pour un stage au moment où je pensais encore faire le Master 1. En effet, je trouvais intéressant de travailler sur les risques professionnels dans cette structure pour plusieurs raisons :
- J’étais intéressée par leur modèle autogestionnaire et transparent
- Avec leur projet codecodecoop, j’aimais bien l’idée que mon travail puisse être utile à d’autres structuress
- Il y avait une forme de continuité avec mon activité professionnelle antérieure et j’aimais bien cette idée
- Je connaissais un peu deux salarié·es et j’avais l’intuition que je pourrais m’y sentir bien.
On a eu pas mal de discussions, car l’alternance changeait certaines choses par rapport à un stage : le coût pour la structure employeuse, la durée, le contenu… On a notamment discuté de mes besoins d’accompagnement dans le cadre d’une alternance, pour que je ne me retrouve pas isolée et moi-même en difficulté. On s’est mis d’accord au cours de l’été que je pouvais faire l’alternance chez elleux ! C’est là que j’ai commencé à me détendre et à savourer la perspective de ma reprise d’études !
Ma préparation estivale
Le codirecteur du Master m’a envoyé des devoirs pour l’été, afin de “m’acculturer” et j’ai donc :
- suivi le MOOC de l’INRS sur la prévention des risques professionnels pour acquérir des bases sur la question. Je le recommande à toutes et tous, il est très clair !
- lu Les conditions de travail de Michel Gollac et Serge Volkoff, qui permet d’appréhender comment les sciences humaines abordent les conditions de travail et leur évolution.
- lu Le caché de la poste de Nicolas Mounin, monographie sur les condition de travail des facteur·ices face aux réorganisations de leurs tournée.
- lu le Guide de l’enquête de terrain de Stéphane Beaud et Florence Weber, pour acquérir de la méthodologie.
Et comme j’ai tendance à en faire trop quand je suis enthousiaste, je me suis abonnée aussi à tous les podcasts francophones qui parlent de travail et de sociologie.
L’été est passé très vite, j’ai quand même pu prendre un peu de vacances au milieu de tout ça et je me suis préparée pour la rentrée que je vous raconterai dans un prochain billet !
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